Recruter de nouveaux collaborateurs est un atout pour une entreprise. C'est une opportunité pour faire émerger de nouvelles idées et innover. Ainsi, les services RH cherchent de plus en plus à améliorer leurs processus de recrutement pour trouver et embaucher les meilleurs candidats.
Mais qu’en est-il de la discrimination à l'embauche ?
Peut-être que vous pensez que votre entreprise n'est pas concernée. Pourtant selon une étude, 42 % des personnes interrogées déclarent avoir été témoins de discriminations.
Il reste encore beaucoup de chemin à faire pour prévenir et éviter les discriminations dans le monde du travail.Continuez la lecture pour en savoir plus sur la discrimination à l'embauche, et surtout, ce que vous pouvez faire pour la prévenir.
Qu'est-ce que la discrimination à l'embauche ?
Une discrimination à l’embauche a lieu lorsqu’un employeur se base sur des critères subjectifs, liés à la personne et non aux compétences, pour prendre une décision de recrutement.
L'article L.1132-1 du Code du Travail interdit toute discrimination en fonction de :
- L’origine
- Le sexe
- Les mœurs
- L’orientation sexuelle
- L’identité de genre
- L’âge
- La situation de famille
- L'état de grossesse
- Les caractéristiques génétiques
- L’appartenance ou la non-appartenance, vraie ou supposée, à une ethnie, une nation ou une race
- Les opinions politiques
- Les activités syndicales ou mutualistes
- Les convictions religieuses
- L’apparence physique
- Le nom de famille
- Le lieu de résidence
- L’état de santé
- Le handicap
- La particulière vulnérabilité résultant de sa situation économique, apparente ou connue de son auteur
- La perte d’autonomie
- La capacité à s’exprimer dans une langue autre que le français
- La domiciliation bancaire
Ainsi, un recruteur ne peut prétexter aucun de ces motifs pour décliner une candidature.
En pratique, l'employeur reste maître de sélectionner les candidats qui correspondent le plus à sa recherche. Néanmoins, sa décision doit pouvoir être justifiée par des raisons précises, impartiales et professionnelles.
Comment dénoncer une discrimination à l'embauche ?
La discrimination à l'embauche est sanctionnée par la loi. Si vous êtes témoin d'une discrimination au travail, il est possible de saisir directement et gratuitement le Défenseur des droits. Il s'agit d'une autorité administrative indépendante dont le rôle est de défendre les personnes dont les droits ne sont pas respectés.
Cette institution peut accompagner la victime de discrimination à l'embauche dans la procédure de dénonciation.
Il existe deux types de recours possibles :
- Le recours civil. Même si aucun contrat de travail n'a été signé, la victime peut saisir le Conseil des Prud’hommes par le biais d'un formulaire. Parfois, il est possible d'obtenir des dommages-intérêts pour le préjudice subi.
- Le recours pénal. Il est nécessaire de déposer plainte auprès du procureur de la République, du commissariat de police, de la gendarmerie, ou du doyen des juges d’instruction du tribunal de grande instance.
Pour plus d'informations, consultez le site du ministère du travail, de l'emploi, et de l'insertion.
Comment éviter les discriminations dans votre processus de recrutement ?
1. Réalisez un audit de la diversité
Il s'agit de faire un état des lieux de la diversité dans votre entreprise. Cela vous permettra d'avoir une image représentative de vos effectifs sur certains critères comme : le genre, l'origine culturelle, l’âge, le handicap, etc. Certaines informations se trouvent déjà probablement dans vos reporting de pilotage RH.Si votre effectif est « homogène », cela signifie qu'il y a peu de diversité dans l'organisation. Ainsi, il est possible que des discriminations soient présentes durant le processus de sélection des candidats.
Ces données vous serviront de base pour suivre les évolutions au fur et à mesure de la mise en place des actions de lutte contre les discriminations de recrutement.
À noter que cet audit doit être réalisé dans le respect de la législation, du RGPD et de la CNIL, concernant les mises en données des caractéristiques personnelles.
2. Mettez en place une charte de la diversité
La Charte de la diversité est un « texte d’engagement proposé à la signature de tout employeur, qui souhaite par une démarche volontariste, agir en faveur de la diversité et dépasser ainsi le cadre légal et juridique de la lutte contre les discriminations ».
Elle a pour but d’encourager les organisations à promouvoir et à respecter la diversité dans les effectifs, durant le processus de recrutement, le management des collaborateurs et la gestion de carrière.
Les entreprises signataires s'engagent à lutter contre toute forme de discrimination et à favoriser la diversité et l’inclusion.
Cette charte a une valeur morale. L'implémenter dans votre entreprise est un moyen d'appuyer la diversité grâce à une initiative insufflée par la direction de l'entreprise. Et cela permet d’insérer la lutte contre les discriminations dans votre culture d'entreprise et votre marque employeur.
3. Rédigez des annonces d'emploi neutres
L'annonce d'emploi est souvent l'un des tout premiers contacts entre un candidat et votre entreprise. Afin de donner une impression positive et surtout, éviter les discriminations, portez une attention particulière au langage que vous utilisez.
L'objectif est d'éviter la discrimination directe, c'est-à-dire, une communication à un groupe spécifique de personnes, et la discrimination indirecte, par la mention de critères peu pertinents qui excluent une catégorie de professionnels.Voici quelques éléments à éviter dans une annonce d'emploi :
- La discrimination de genre. Par exemple, n'écrivez pas "assistante" ou "commerciale (femme)". Préférez l'écriture inclusive ou l'indication "F/H" pour indiquer que l'offre est aussi bien ouverte aux femmes, qu'aux hommes. Aussi, il est plus pertinent d'utiliser la 1ère personne du pluriel (vous) plutôt que la 3ème personne du singulier (il/elle).
- La discrimination d'âge. Évitez les termes en référence à l'âge comme "jeune" ou "mature", que ce soit dans le profil recherché, ou la description de l'équipe et de l'entreprise. De plus, n'énoncez pas de fourchette d'âge. Les termes "junior" et "senior" ne doivent être utilisés que pour décrire un niveau d'expérience dans le rôle.
- La discrimination d'origine. Si vous recherchez un candidat qui possède des compétences linguistiques spécifiques, mentionnez la langue recherchée plutôt que la nationalité. Par exemple, ne recherchez pas un candidat "de langue maternelle portugaise" ou un "ressortissant portugais". Optez plutôt pour l'appellation "bilingue français/portugais" ou une formulation comme "vous parlez portugais couramment". À noter que l'annonce doit être rédigée en français si le poste est à pourvoir en France ou si l’employeur est français. Cela s'applique également si le poste est basé à l'étranger et que la langue de travail principale est le français. Mais il est tout à fait possible d'écrire deux annonces, une en français et une en portugais par exemple, afin d'atteindre votre cible de candidats.
- La discrimination de handicap. Elle est souvent plus subtile. Pour la prévenir, il faut omettre la mention de critères non-essentiels qui pourraient exclure une catégorie de personnes. Par exemple, n'indiquez pas que le candidat doit posséder le permis de conduire si cela n'est pas nécessaire dans l'exercice de sa fonction. Cela pourrait empêcher des personnes porteuses d'un handicap de postuler à l'annonce.
4. Anonymisez les CV
Comme vous le savez, le CV comporte de nombreuses informations personnelles sur un candidat comme : le nom, l'âge, le sexe, la nationalité, l'adresse physique et l'adresse mail. Parfois, une photo est également présente.
Pour éviter les discriminations et les biais de recrutement, il peut être intéressant de faire appel à une personne extérieure au processus d’embauche pour anonymiser les CV. Il s'agit de supprimer toute information personnelle qui n'a pas de lien avec le monde professionnel. De cette manière, vous concentrez la sélection sur des critères justes et cohérents avec le poste à pourvoir.
Loin d'être une méthode de recrutement déshumanisante, c'est une opportunité pour favoriser l'égalité des chances.
5. Proposez des exercices pratiques
Ce conseil est valable essentiellement pour le recrutement de profils techniques.
Au lieu d'effectuer une présélection par une analyse de CV, envoyez un test de technique ou un cas pratique au candidat. Pour le recrutement d'un développeur web, proposez un test de code par exemple.
Ainsi, vous évaluez le savoir-faire du candidat sans être influencé par d’éventuels préjugés. Il s'agit également d'une excellente opportunité pour donner une chance à un professionnel autodidacte de faire ses preuves.
6. Posez des questions pertinentes en entretien de recrutement
Il est courant d’observer des discriminations à l’embauche durant les entretiens de recrutement.
Il suffit de parcourir certains réseaux sociaux comme LinkedIn ou Twitter pour lire des expériences de recrutement désastreuses durant lesquelles des recruteurs ont posé des questions très personnelles au candidat.
Pourtant, la loi est claire à ce sujet. Selon l’article L1221-6 du Code du travail « les informations demandées, sous quelque forme que ce soit, au candidat à un emploi ne peuvent avoir comme finalité que d'apprécier sa capacité à occuper l'emploi proposé ou ses aptitudes professionnelles. Ces informations doivent présenter un lien direct et nécessaire avec l'emploi proposé ou avec l'évaluation des aptitudes professionnelles ».
Voici quelques exemples de questions discriminatoires à ne surtout pas poser durant en entretien d’embauche :
- L’âge. « Quel âge avez-vous ? »
- La situation familiale. « Êtes-vous marié ? » ; « Souhaitez-vous avoir des enfants ? »
- L’origine ethnique et culturelle. « De quel pays venez-vous ? »
- Les idées politiques. « Que pensez-vous des dernières élections présidentielles ? »
- Les croyances religieuses. « Êtes-vous croyant ? »
- L’appartenance syndicale. « Adhérez-vous à un syndicat ? »
Pour aller plus loin sur le sujet, écoutez notre conversation avec Caroline Chavier, CEO de The Allyance sur la diversité et l’inclusion dans le recrutement.
7. Formez vos équipes de recrutement à repérer et éviter la discrimination à l'embauche
S’il est essentiel que la direction et les équipes de management soient des acteurs de la prévention de la discrimination à l'embauche, il est tout aussi important de former vos collaborateurs.
Il s'agit d’ailleurs d'une obligation selon la loi Égalité et Citoyenneté du 27 Janvier 2017 : « dans toute entreprise employant au moins trois cents salariés et dans toute entreprise spécialisée dans le recrutement, les employés chargés des missions de recrutement reçoivent une formation à la non-discrimination à l'embauche au moins une fois tous les cinq ans ».
Toutefois, n’hésitez pas à aller plus loin dans la sensibilisation à la discrimination au travail. Par exemple, vous pouvez proposer des ateliers de discussion, faire intervenir des spécialistes extérieurs ou encore, réaliser une campagne de communication sur votre réseau intranet.
Ce sont toutes ces actions qui libéreront la parole pour intégrer la lutte contre les discriminations et la diversité dans l'ADN de votre entreprise.
8. Utilisez consciemment vos outils digitaux de recrutement
De nombreuses entreprises tirent profit des outils digitaux durant le processus de recrutement, du sourcing de candidats jusqu’à l’onboarding des nouvelles recrues.
Il faut dire que le big data et l’intelligence artificielle permettent de gagner du temps et d’améliorer les performances du recrutement tout en optimisant l’expérience candidat. Il serait dommage de s’en passer !
Toutefois, il est important de se rappeler que ces outils ont été créés par des humains. Ainsi, ils peuvent parfois présenter des biais et sélectionner vos candidats sur des critères discriminatoires.
Alors, gardez un œil critique sur la manière dont les outils trient et évaluent les candidatures. Et évitez également les recherches filtrées par critères personnels comme l’âge ou le sexe.
9. Tenez-vous informé des législations en matière de discrimination
La discrimination à l’embauche est un sujet brûlant qui suscite souvent de vives réactions. La législation évolue en permanence et de nouvelles jurisprudences sont régulièrement publiées
Pour vous assurer que votre processus de recrutement respecte la loi et élimine les discriminations, réalisez une veille constante. Il peut être utile de désigner un référent qui sera en charge de communiquer les actualités à ce sujet et les mises à jour du Code de travail.
La prévention de la discrimination à l’embauche est encadrée par la direction de l’entreprise. Les équipes RH et les managers impliqués dans ce processus doivent être formés et sensibilisées aux préjugés et aux biais de recrutement.
Au-delà des actions pratiques, il est essentiel d’intégrer la lutte contre les discriminations dans la culture de l’entreprise pour qu’elle soit efficace et durable.